samedi 9 mars 2013

Katharine d'Aragon, princesse humiliée. Première partie: de Grenade à Londres.

« I must and will have Katharine to my wife » (Shakespeare, La mégère apprivoisée Acte II)

 “And, kiss me Kate, we will be married o’  Sunday.” (Shakespeare, La mégère apprivoisée,
Acte II)

Peu d’épouses dans l’histoire des royautés européennes ont été aussi humiliées que Catalina, fille de leurs Majestés Catholiques, Isabelle de Castille et Ferdinand d’Aragon. Son divorce d’avec Henry VIII, roi d’Angleterre a bouleversé le cours de l’Histoire, a causé la perte d’hommes  célèbres (dont le savant humaniste anglais - et martyre catholique - Sir Thomas More, auteur  de l’ouvrage philosophique « Utopia » et le Cardinal John Fisher décapité  en même temps que Thomas More) et a marqué le début des manifestations d’une folie et d’une cruauté jusque là peu perceptibles chez un jeune monarque très aimé : Henry VIII  d’Angleterre.

Catalina, plus tard connue comme Katharine d’Aragon, est née près de Tolède en 1485.Dès l’âge de trois ans elle est fiancée à Arthur, Prince de Galles, fils aîné du roi Henry VII Tudor d’Angleterre. Mais ces fiançailles, (comme beaucoup de fiançailles entre très jeunes enfants de rois) sont assez incertaines. Incertaines, tout comme le statut de « Rois légitimes d’Angleterre » de la toute nouvelle dynastie Tudor, qui ne règne que depuis la victoire de Henry Tudor, Comte de Richmond (devenu Henry VII) à la bataille de Bosworth Field, en 1485… Mais  cette dynastie, un peu « parvenue » se consolide peu à peu, et finalement Isabelle  de Castille et Ferdinand d’Aragon laissent partir leur fille âgée de 16 ans vers son frêle fiancé, Arthur, âgé de 15 ans au mois d’ août 1501.

Katharine est la fille cadette d’une femme  qui a une très forte personnalité. Une mère qui exige que sa fille ait une éducation exemplaire. Qu’elle connaisse aussi bien les auteurs anciens, le grec et le latin, que l’art du tissage, de la broderie et de la cuisine. Qu’elle sache commander et qu’elle sache obéir. Qu’elle sache dès son plus jeune âge d’où elle vient, que ses parents sont les plus grands souverains d’un monde qui ne cesse de s’élargir, que dans ses veines coule aussi du sang anglais (elle est d’ascendance Plantagenêt) et qu’elle est destinée à régner.

Depuis le beau palais de l’Alhambra à Grenade, de belles lettres écrites en latin partent vers le lointain fiancé anglais. Et, finalement, en octobre 1501 c’est la rencontre avec Arthur, le départ vers Richmond et, en novembre, le mariage en la Cathédrale St Paul de Londres.

 Un amour timide naît entre les deux adolescents, mais le mariage n’est, très probablement, jamais consommé .En tout cas Katharine jurera jusqu’à son dernier jour qu’elle est restée vierge durant les quelques mois du mariage au pauvre jeune adolescent maladif, chétif qui meurt le 2 avril 1502, dans le château de Ludlow, dans ce Pays e Galles dont il est le prince… Katharine est veuve à 16 ans.

Quel sera son destin ?

 D’une part, Henry VII, avare notoire, ne veut pas entretenir sa belle-fille. " Que ses parents riches l’entretiennent "- déclare-t-il. D’autre part il veut garder sa dot. Donc il ne veut pas la laisser repartir en Espagne. On la fiance donc au nouveau  Prince de Galles, âgé  de 11 ans. C’est Henry. Le futur Henry VIII. Un beau garçon, qui sait très bien ce qu’il veut. Et il ne veut pas de cette « Katharine », veuve de son frère, malgré la dispense du Pape et malgré  les souhaits de son père. Cette princesse de plus en plus pauvre, cette princesse aux robes rapiécées, qui doit vendre les bijoux qui constituent sa dot, qui doit congédier les gens de sa maison londonienne parce qu’elle ne peut plus les rémunérer. Et cette pauvreté londonienne humiliante, cette pauvreté à la fois loin de Grenade et loin de la Cour de Londres durera 7 ans.

 Et voici que Henry VII meurt en 1509 et le bel Henry VIII (le futur gros monstre, mais qui le savait à l’époque ?) ce jeune roi auquel on destine de belles princesses européennes, montre une fois pour tout qu’il ne fera qu’à sa tête. Il ne voulait pas de Katharine lorsqu’il était enfant ? Maintenant il la veut. Il la veut et il l’épouse. Ils s’aiment. Le plus triste, c’est que c’était un vrai mariage d’amour...


Fin de la première partie.


Elisheva Guggenheim-Mohosh

3 commentaires:

  1. Une façon intéressante de rendre l'Histoire plus vivante

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  2. Réponses
    1. Voir les deux prochains articles de cette série : " Katharine d'Aragon: souffrir la tête haute" et " Katharine d'Aragon: la déchéance".

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